L’idée que le français est la langue de la logique et de la clarté serait un mythe. C’est le point de vue, par exemple, de R. Anthony Lodge (professeur de français dans une université britannique qui a beaucoup travaillé sur l’histoire de la langue française). La clarté n’étant pas un donné naturel de la langue, il convient plutôt, selon lui, de se convaincre que ce qui importe, c’est l’usage qu’on en fait. Aussi, votre langue d’expression, le français ou toute autre langue, sera claire pour autant que vous respecterez, comme sur la question de l’efficacité, certaines règles.

Où l’abstraction n’empêche pas la compréhension …

L’écriture qui accompagne un travail de recherche, vous contraint parfois à recourir à beaucoup de notions abstraites. Mais on ne doit pas penser que, parce que l’on s’adresse prioritairement à des lecteurs avertis (les universitaires), on est dispensé de s’exprimer avec cette clarté exigée et il est préférable d’éviter un langage trop savant. Il existe par ailleurs différents moyens de ne pas empêcher la bonne compréhension du propos. Il faut par exemple savoir accroître l’information, en particulier lorsque celle-ci porte sur les idées-maîtresses. Cela peut se faire en particulier par l’ajout d’exemples (à introduire au moyen des parenthèses, du deux-points, etc). Il s’agit plus précisément d’éclairer une notion par la référence à un fait, une personne ou tout autre élément. Référence que l’on devra en tous les cas toujours pouvoir vérifier.

Le texte se construit aussi par la progression logique …

J’ai fait observer, dans mon précédent article, qu’expliquer consistait notamment à « trouver les causes ou les conséquences d’un phénomène ». Pour reconsidérer la question du point de vue de la clarté, on peut ajouter que l’explication consiste aussi en une précision qui résout un problème, rend clair ce qui est obscur, donne les raisons ou la finalité de quelque chose. De là, l’effort de faire comprendre le pourquoi et le comment d’un processus, d’un événement, en indiquant effectivement les rapports de cause à conséquence par des mots-charnières (parce que, de sorte que). Pour désigner ces mots, on parle aussi de vocabulaire à valeur logique.

Il faut également savoir effectuer des retours sur information. Notamment, là encore, lorsqu’il s’agit d’exprimer des idées-maîtresses dans le cours de votre démonstration. Cela aura nécessairement un effet de cohérence sur votre texte, d’homogénéité sur l’ensemble de votre travail ; et vous permettra de ne pas vous égarer au-delà des limites de votre sujet et de votre problématique. Vous pouvez le faire de deux manières : soit par effet de confirmation, soit par effet de correction si nécessaire (lorsque par exemple votre démonstration de départ doit faire l’objet d’un réajustement parce que vous aurez introduit dans votre propos une idée nouvelle).

Des mots justes et précis …

Au bénéfice de la clarté, la justesse des mots est également de rigueur dans un écrit scientifique. Il sera par exemple toujours utile d’exploiter les champs lexicaux afin de pouvoir porter son choix sur le terme qui correspond le mieux à l’idée exprimée. Une bonne connaissance des champs lexicaux  des différentes notions de votre domaine d’étude, quel qu’il soit, ne peut que contribuer à enrichir votre vocabulaire et faciliter la réflexion.

Par conséquent, l’emploi de mots précis s’impose aussi tout naturellement dans le cadre d’une recherche qui nécessite, par exemple, d’accorder une préférence aux termes spécifiques plutôt que génériques. Cela vaut autant pour un rapport de stage où l’on rend compte d’une expérience de terrain, que pour une thèse ou un mémoire où prennent place d’importantes parties théoriques.

Il faut ajouter, en définitive, que la clarté est une garantie de rigueur dans un écrit universitaire, parce qu’elle permet de se préserver des effets de style ou des artifices. Ces derniers sont en effet des travers auxquels on peut parfois se laisser aller dans un travail d’écriture de longue haleine… Et la rigueur commande ici d’être scientifique. En tous les cas, elle sera déterminante pour vous permettre d’avancer avec davantage de facilité dans vos travaux de rédaction et d’être favorablement reçu lorsque votre mémoire sera lu et évalué. Quand au style, qui ne se réduit pas à des « effets », il fera l’objet du dernier article de cette série …

[A suivre]

BIBLIO :
R. Anthony Lodge : Le Français, histoire d’un dialecte devenu langue (Fayard, 1997).
R. Arcand et N. Bourbeau : La Communication efficace (De Boeck, 1998).