Vous avez peut-être déjà fait cette expérience, soudaine, de connexion au temps présent et d’une sorte de bien-être, sans avoir cherché à le provoquer. Un vide intérieur se produit alors, qu’aucune pensée, a fortiori négative, ne vient troubler.
Mais cette expérience, précisément parce qu’elle n’est pas provoquée, est à chaque fois de courte durée.
Le « présent » donc, comme le « mental », l’ « être », l’ « ego », la « réalisation » (de soi)… sont les mots qui reviennent le plus souvent sous la plume d’Eckhart Tollé qui nous invite, dans son livre Le pouvoir du moment présent, à nous reconnecter à cette part de nous-même que nous ignorons trop souvent, notre moi profond, afin de trouver le chemin de l’illumination.
Le salut n’est ni dans le futur ni dans le passé, semble nous dire ce livre, mais dans le présent. Et c’est une affaire de pure conscience que de savoir s’y connecter. Même pour les non-initiés aux pratiques spirituelles.
Tollé nous explique que nous sommes esclave de notre mental, et plus précisément de notre identification au mental. Ce mental qui agit comme un écran opaque à la réalité profonde de notre être qu’il s’agit d’atteindre. Un mental fait d’étiquettes, de jugements, de définitions. Bref, d’images ou de mots… Et en général, tout cela n’est là que pour nous renvoyer à notre ego. Nous faisons tous cette expérience, certains plus que d’autres, et qui parviennent à se complaire même dans des abîmes de pensées parfois noires… Mais si l’auto-complaisance peut parfois tendre au masochisme, cela révèle surtout que nous avons besoin d’occuper notre esprit. Sans avoir conscience que dans certains cas nous l’occupons à nous identifier à notre moi malheureux et plein de peur profonde, et qui n’est qu’une fiction. Et cela n’est pas non plus sans lien avec la sous-estimation de soi.
Il faut donc, d’après l’auteur, se désengager de cette identification.
Il faut savoir échapper aux pensées. Echapper à ce mental, ou plutôt s’en défaire chaque fois que c’est possible, car on a tout de même besoin, périodiquement, d’y revenir pour les nécessités du quotidien. Il faut, en vérité, nous libérer essentiellement de notre ego. Et ce n’est pas le plus simple.
E. Tollé nous livre de nombreuses pistes pour y parvenir avec toujours cette idée de se connecter avec le présent. Il faut notamment avoir à l’esprit que le mental est un penseur. Et qu’il faut savoir l’observer. C’est le moyen, en particulier, de prêter attention aux shémas de pensée répétitifs. Nous écoutons ce penseur, nous sommes le témoin de notre pensée. C’est ainsi qu’elle perd de son pouvoir, que nous pouvons percevoir notre moi profond. Nous nous désidentifions d’elle, nous n’alimentons plus le mental.
Et notre ego s’absente.
C’est une expérience individuelle, pour soi, mais qui est également bénéfique dans la vie amoureuse.
Pour Tollé, la plupart des relations amoureuses sont des relations de dépendance : Si dans vos relations, vous connaissez aussi bien l’amour que son opposé, c’est-à-dire l’hostilité, la violence émotionnelle, etc., vous confondez amour et attachement de l’ego, amour et dépendance affective… Là encore, il faut savoir se faire le témoin de cet ego, des rôles qu’il joue, des scénarios mentaux qu’il échafaude. C’est comme cela que l’on peut sortir des jugements que l’on porte sur l’autre que l’on rend responsable de ne pouvoir combler nos besoins, qui sont en réalité les besoins de notre ego.
Le plus difficile sans doute est de vivre l’amour en tant qu’état (ce qu’il doit être), et non en tant que comblement d’un manque. Et l’amour en tant qu’état ne peut être vécu que dans le présent.
Or, dans une relation, on ne peut s’empêcher de penser à demain. De se questionner pour savoir si l’amour va durer. Et le mental est de retour. Un sage indien a dit qu’il n’y a que deux langages possibles : Le langage logique, langage de l’intellect, toujours égocentrique. Et le langage de l’amour où l’on se soucie non de soi mais de l’autre. Où ce qui importe est non ce qu’on dit mais la façon dont on le dit. Quand on pense au lendemain, on entre à nouveau dans la roue du devenir pour citer ce sage indien, qui dit aussi par ailleurs que l’intellect détruit tout et (que) le mariage est un calcul mental.
Le problème est sans doute que l’amour s’exprime la plupart du temps avec le langage logique. Il devient, dans la répétition des gestes, devoir et non plaisir. Et cela est dû au mental. Il faut donc empêcher le mental de créer des habitudes. Empêcher, en amour, la réflexion de créer des modèles d’espérance sur lesquels nous pouvons nous appuyer, qui nous permettent de croire que notre relation est solide et rassurante. Ce qui est important en réalité c’est, comme le dit l’auteur, qu’on transforme une relation de dépendance en une véritable relation en intensifiant sa présence, en amenant son attention dans le « maintenant ».
En tous les cas, – que nous soyons seul ou que nous soyons deux -, Eckhart Tollé nous invite à nous observer. A réfléchir à nos conflits intérieurs. A commencer par prendre conscience de notre incapacité à cesser de penser qui peut parfois générer de la souffrance. Un simple moment de conscience de soi peut nous permettre de réaliser que notre ego nous mène souvent la vie dure…
Si l’on parvient déjà à cela, une nouvelle voie peut s’ouvrir.
Un livre à lire et à relire car nous sortons de cette lecture d’une certaine façon emplis d’espoir et curieux de tenter l’expérience du moment présent…
L’avenir nous tourmente, le passé nous retient, c’est pour ça que le présent nous échappe.
G. Flaubert
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